Parce que tu pourras aller voir…

avril 18th, 2008 by Batiste

Ca a été coton de trouver le meilleur moyen pour rentrer à la maison… Avant c’était facile, il suffisait de prendre le RER A, de s’arrêter à Auber (tu peux ouvrir un plan de métro lecteur, parce que dans ce paragraphe on en bouffe un peu), et de finir à pied… Rapide. La belle vie !!

Maintenant que mon petit chez moi est à Oberkampf (hop, le plan de métro), et que vient s’ajouter aux possibilités du RER et du métro celle du vélib (Haha, tu peux aussi sortir un plan du vélib !!), c’est à force de tâtonnements plus ou moins heureux, de “Ha oui là oui mais en fait non c’est plus long”, de “Ha oui tiens oui, mais là y a jamais de vélos” et de “Ce soir il pleut”, que j’ai fini par trouver le moyen le plus court pour rentrer à la maison : RER jusqu’aux Halles et Vélib jusqu’à la maison !!

Bref (tout ça pour te mettre un peu de contexte), tous les soirs je traverse les Halles blindées de monde… Et vas y que ça fourmille, et vas  que ça se rentre dedans à grand coup d’épaules, et vas y que je voulais prendre le petit escalator mais ça va pas être possible, et vas y que tu me marches dessus !!

J’étais donc en train de fredonner le 5° concerto de Beethoven en traversant la place carrée quand je les ai vus. Ce concerto, la première fois que je l’ai entendu c’était avec Clark, en concert à la Halle aux grains de Toulouse alors qu’on était encore tout étudiant et que nos moins de 25 ans nous permettaient d’aller nous faire des petits concerts quasi-gratos à la Halle aux Grains.

A chaque fois je restais scotché, et tous les archers qui bougent, les vagues qui parcourent l’orchestre, l’implication des musiciens me faisaient rentrer dans le morceau. Et puis il faut avouer que le public est un peu midinette. Alors ça fait le sérieux quand ça rentre dans la salle, ça prend sa place furetant dans le programme, ça fait le difficile avant que ça commence, mais une fois que le concert est fini ça s’époumone, et vas y que ça en veut une autre, et vas y que c’était trop bien, et vas y que ça met son slip sur la tête…
Exemple :
Le public : “une autre, une autre, une autre”
Le soliste : “Bon ok, alors je vais vous faire une impromptue de Chopin”
Le public : “Haaaaaaa” -> Hop, midinette (facile)

Tout hypnotisé qu’on avait été par ce concerto, Clark l’avait téléchargé dans la foulée (c’est mal) et depuis il tourne régulièrement dans mon petit lecteur MP3…

Bref (c’était encore du contexte), je traversais donc les Halles avec ce concerto dans les oreilles quand je les ai vus. Je les ai repérés parce que c’est pas le genre qui se parle en général à Paris : un jeune noir habillé en rappeur et une vieille blanche habillée un peu vieille France.

Ils étaient sur le côté de la place carrée, face à face, et faisaient plein de gestes en se parlant. Une observation plus tard, il s’est trouvé qu’en fait ils se parlaient en faisant plein de geste, et qu’à coté d’eux il devait y avoir une dizaine d’autres muets dans des conversations passionnées, de toutes les générations et de tous les milieux apparemment.

J’ai découvert depuis que la place carrée est un lieu de rendez-vous pour les muets qui veulent se rencontrer, et tous les soirs quand je passe je regarde si d’autres sont là. Et tous les soirs (surtout le vendredi) je tombe au beau milieu de débats passionnés entre gens qui ne se seraient jamais rencontrés s’ils avaient parlé.

Comme quoi au beau milieu des Halles, dans ces flots qui se croisent sans jamais se regarder ou se parler, chacun bien dans son monde et fermement décidé à y rester, les seuls qui communiquent sont muets.

This entry was posted on Vendredi, avril 18th, 2008 at 22:28 and is filed under Ils existent et ils sont plusieurs, J'aime la vie je fais du vélo et je vais au cinéma. You can follow any responses to this entry through the RSS 2.0 feed. You can leave a response, or trackback from your own site.

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